#Japon #psychanalyse #anthropologie #Lacan #societe #politique #Sciencespo #education

19 Avr

De l’obsessionnalisation du monde, ses outrances, son conformisme, son obséquiosité…

Le contrôle omnipotent de l’objet se développe comme une défense contre l’angoisse dépressive, la culpabilité et la perte.

Une suradaptation au réel, pré-texte d’une organisation sociale idéalisée de l’espace social, portant les signes d’une défense maniaque, qui peut pousser nombre d’adolescents au désespoir, à l’insomnie ou à l’épuisement pour lutter contre leur emprisonnement fondamental ?

On utilise les termes de claustration, retrait social, housebound syndrome, #hikikomori, pour des descriptions rencontrées dans diverses contrées.

L’Ordre devient l’obligée de la Vérité, il s’y substitue par déplacement métonymique.

Les taxis et les trains s’arrêtent et démarrent à la seconde prêt.

Le comportementalisme désuet et son efficacité managériale s’établissent avec bienveillance…

Un univers symbolique réglé par ses structures, ses codes, et ses signifiants, Discours de l’Autre, venant constituer l’homme dans son être même ?

Il n’y a pas de rapport sexuel dans la Political Correctess qui incite à des sentiments «corrects» à l’endroit des races, des genres et des identités sexuelles.(1)

Le cache-sexe de la normalisation…

Depuis la fin des années 1980, certaines administrations d’universités américaines publient-elles des directives portant sur les rapports entre étudiants, et entre étudiants et professeurs.
Le Massasuchetts Institute of Technology (MIT), Brown University, Stanford, Tufts, Duke Uni- versity, Antioch College s’attachent à imposer des codes de comportement stricts.

Le MIT sanctionne «les conduites verbales ou physiques qui créent une atmosphère … hostile, menaçante, ou même simplement déplaisante à l’université, dans les relations professionnelles ou dans les relations humaines de manière plus générale».

Faut-il alors voir, dans la Political Correctness, une conception du politique, un pas, qui, en revendiquant la non-distinction entre la sphère privée et la sphère publique, comporterait, à l’intérieur même des démocraties, des aspects totalitaires ?

Faire promulguer des codes de comportement, dès l’école maternelle, destinés à se substituer aux institutions démocratiques.

Enseigner l’empathie ?

Traquant les préjugés raciaux, ethniques et sexuels dans le langage, dans les sentiments et les conduites les plus privés, l’intrusion dans l’intime est au cœur de l’éducation des sensibilités encouragée par la Political Correctness.

Faut-il y reconnaître l’unheimlich d’une jouissance primitive refoulée ?

(1) Nous utilisons l’expression Political Correctess ou les initiales qui la désignent (PC). Pour l’analyse du mouvement aux Etats-Unis, se reporter au numéro de Partisan Review consacré à la Political Correctness, mai 1993; à J.-M. Choy et
J. Murphy, The politics and philosophy of Political Correctness, Westport,
Praeger
Publishers, 1992, et à B. Epstein, «Political Correctness and collective powerlessness », Socialist Review, 21 (3-4), décembre 1991.
De ce dernier auteur, voir encore Poltical
protest and cultural revolution: nonviolent direct action in the 1970s and 1980s, Berkeley, University of California Press, 1991.

Work in progress

#Japon #psychanalyse #electricite #politique #économie

19 Avr

Demander son Visa et passer le brevet de pilote de chasse…

Pilotage de jet…

Je fais une phobie du pilotage de jet…ne me risquant pas à la délimitation du sujet, somme toute, de l’inconscient.

Je partirai sans connaître cette bienveillante jouissance postérieure renouvelée de l’hygiène poussée à l’extrême onction, par la médecine, la pharmacie, la chimie, le génie civil et militaire, l’administration publique, les statistiques et l’économie politique.

Je me demande combien de tranches nucléaires faut-il au Japon pour assouvir le bien-être en vogue, de ses popotins fondements ?

#psychanalyse #education #Tournus #Louhans claude Breuillot / #Psychologue #psychanalyste

26 Mar

Congrès d’Alger / 11-2023

Une question semble particulièrement opérante et cruciale dans la quotidienneté des institutions scolaires, hospitalières ou sociales : l’imaginaire d’un monde paysan, au plus près de la nature, pourrait-il protéger les enfants et les adolescents?

Les réseaux sociaux et les fantasmes sexuels sous-jacents ne viennent-ils pas infuser dans l’intimité de la chambre de l’enfant ?

La psychologie dite positive et la bienveillance pourraient-elles devenir le déplacement de la séduction inconsciente ?

L’Institution, contrainte au discours du bien-être ineffable, peut-elle devenir maltraitante en ne jouant pas son rôle de pare-excitation ? Penser la sexualité infantile est-il encore de son temps ?

https://hal.science/hal-04505981

#Japon #Sado #Izu #psychanalyse

19 Fév

Sur les traces de la psychanalyse au Japon…

Préparation à mon voyage au Japon en avril 2024.

L’introduction de la psychanalyse au Japon n’est pas si tardive, par rapport à ce qu’il en était, par exemple, en France, dont Freud disait en 1914 qu’elle était le pays où la psychanalyse était le moins développée en Europe.

Cette réaction assez rapide des Japonais n’est pas si étonnante dans la modernisation massive de la civilisation et de l’industrie du pays qui a commencé en 1868. Les intellectuels avaient la fureur de connaître, rien ne leur échappait des nouveautés des sciences occidentales.

Par l’importance de ses publications, Marui Kiyoyasu peut être reconnu comme le premier chercheur important de la psychanalyse au Japon : il traite de la paranoïa (1921), de l’hébéphrénie (1923) dans la revue de Neuro-psychiatrie japonaise, puis de l’hystérie avec son disciple Kozawa Heisaku (1927), des phobies (1929), de la mélancolie (1930), etc.

Ses livres sont publiés plus tardivement: Paroles de psychotiques, Psychopathologie
(1951), Caractérologie psychanalytique (1952). Après la guerre, il fonde l’Association psychanalytique japonaise de Sendai.

C’est à la même période (1920-30) qu’un licencié ès lettres, Otsuki Kenji (1892-1977), commence à publier des textes psychanalytiques et une traduction dans le cadre de l’Association psychanalytique de Tôkyô ; des imprécisions ou contresens fourmillent dans ses traductions de Freud.

Les premiers textes japonais de psychanalyse présentent deux axes qui caractériseront la psychanalyse d’après guerre : un lien avec l’éducation (corriger les «défauts de caractère» et se servir de «l’immaturité des sujets japonais») soit pour diriger le patient et le porter (c’est-à-dire jouer le rôle de l’idéal du moi et permettre l’identification au thérapeute) soit pour le libérer de son moi, par-delà la régression (lui permettre ainsi de s’identifier avec un absolu tel que la Nature, la Mère ou même le Japon conçu comme une entité idéale : oublier le moi pour trouver le «vrai Soi») ; et un lien avec la religion dans la mesure où l’analyse devrait être un salut, un «nouveau dieu»
(Kozawa) ou amener au nirvana (Yabe) ».

Le troisième personnage important avant la guerre est Yabe Yaekichi.

Avec Okonogi, fidèle à son Maître, le revirement vers des idées pré-analytiques est indispensable pour que l’analyse soit supportable au Japon.

Jusqu’en 1980, Ajase et son mythe restera le symptôme de l’analyse «à la japonaise». Sexualité infantile, castration, importance du père dans la constitution du sujet sont des thèmes freudiens rejetés de la psychanalyse dite «freudienne» par Kozawa et les membres de son école. Les formations de l’inconscient et le complexe de castration sont ainsi minimisés.

#Liban #Égypte #géopolitique #religion

19 Fév

La complexité du Levant

La XIXe dynastie ayant pris le pouvoir en Égypte, Seti I (1318 – 1298 avant JC) leva une forte armée et se dirigea vers l’Orient en passant par la côte. Il traversa Tyr en y laissant une stèle et continua sa marche vers le Nord pour arriver jusqu’à Qadesh, dans laquelle il laissa aussi une stèle le représentant devant la déesse Qadesh. Cette campagne calma les éléments turbulents du Nord, mais pas pour longtemps, puisque les troubles reprirent après la mort de Seti. Ceci nécessita une nouvelle campagne égyptienne commandée cette fois par Ramsès II (1298 – 1232) qui refit le même chemin que Seti en laissant derrière lui des stèles à Adloun et à Nahr el-Kalb et en construisant un temple à Byblos. Il livra bataille aux armées hittites à Qadesh.

Qadesh ou Kedech est une ville de la Syrie antique. Elle correspond au site actuel de Tell Nebi Mend, situé à 24 km au sud-ouest d’Homs, en amont du lac Qattina ou lac de Homs, sur la rive ouest de l’Oronte à proximité de la frontière libanaise.

Cette bataille fut un succès pour lui dans la mesure où il arrêta l’avance des Hittites pour toujours. Le roi de Byblos contemporain de Ramsès II était Ahiram dont le sarcophage actuellement exposé au musée de Beyrouth comporte la première inscription importante en caractère alphabétique jebeïlite. Cet alphabet a été à l’origine des alphabets du monde entier à l’exception des alphabets de l’Inde, de la Chine et du Japon.

En effet, ce sont les Phéniciens qui l’enseignèrent aux Grecs, lesquels le passèrent à leur tour aux Romains et à toute l’Europe. Au XIIe siècle, l’Égypte et l’empire hittite entrèrent en période de décadence : l’Égypte à cause des attaques répétées des peuples de la mer et l’empire hittite du fait du démembrement de l’unité intérieure aggravée par les attaques répétées des tribus barbares parmi lesquelles certaines tribus assyriennes.

La décadence de ces deux empires et le fait que l’empire assyrien ne s’était pas encore formé a permis aux cités phéniciennes qui n’étaient pas éprouvées par les peuples de la mer (Ugarit fut complètement détruite) d’inaugurer une ère de prospérité sans pareille qui allait durer jusqu’au VIIe siècle.

Ougarit est une ancienne cité du Proche-Orient, située dans l’actuelle Ras Shamra, à onze kilomètres au nord de Lattaquié, en Syrie. C’est la capitale de l’ancien royaume homonyme qui a existé au IIᵉ millénaire av. J.-C., au moins d’environ 1800 à 1185 av. J.-C., aux époques de l’âge du bronze moyen et récent.

Les Phéniciens mirent à profit cette indépendance relative en intensifiant leur commerce intérieur et en fondant des colonies sur tout le pourtour de la Méditerranée et même sur les côtes de l’Atlantique en Espagne, en Bretagne et en Grande-Bretagne (îles Cassétérides). Les colonies les plus importantes étaient : Tarshish (XIIe siècle) Qadesh, Melko (Monaco), Massilia (Marseille), Utiqa et Carthage.

Les hittites ?

Sur les monuments égyptiens, ils portent le nom de Khiti. Dans les inscriptions de Tell Armana ils sont appelés Hat-ti. Hitti veut dire Arménien.

Dans les textes cunéiformes assyriens, il est souvent question de ‘ Hatti ‘ dans un contexte qui le situe généralement en Syrie ou en Palestine. Il s’agit peut-être d’allusions aux Hittites de la Bible.

Les sources qui nous ont conservé quelques lambeaux de leur histoire sont d’abord la Bible, puis des documents égyptiens et assyriens et les inscriptions de Van.

Les Hittites dans la Bible

Selon le livre de la Genèse (chp10 vst 15), ce peuple est issu de Heth, le deuxième fils nommé de Canaan (Gn 10:15). Les Hittites étaient donc des descendants de Cham (Gn 10:6), un des trois fils de Noé. Le terme Héthien paraît 47 fois dans les Écritures hébraïques et le mot Heth 14 fois, ce qui révèle un peuple éminent de l’Antiquité dont il est souvent question dans l’histoire biblique depuis peu de temps après le déluge jusqu’à l’époque des rois hébreux.

Abraham eut affaire aux Hittites, qui résidaient déjà en Canaan à l’époque où il s’y rendit. Dieu avait promis à Abraham de lui donner le pays de Canaan qui était occupé par un certain nombre de nations, dont la nation hittite (Gen 15:18-21).

Quand Ésaü, petit-fils d’Abraham, épousa des femmes hittites, ce fut “ un sujet d’amertume d’esprit pour Isaac et pour Rébecca ”, son père et sa mère, qui se dit  » dégoutée de la vie à cause des fils de Hèt.  » – Genèse 26:34,35; 27:46

L’Oronte, le rebelle, ou « Al Assi », en arabe, est le seul véritable fleuve des pays du Levant.

J’ai découvert, au Liban, près d’Hermel, à la frontière de la Syrie, sa source bleutée, avez mes amis, dont Toufic de Baalbeck.

Il draine la Syrie intérieure, du revers du Liban aux piémonts du Taurus, sur 610 km de long et son bassin s’étend sur plus de 24 800 km2 dont 70 % en Syrie (moyenne vallée).

Son cours n’a pas toujours été favorable à l’activité humaine et présente de nombreuses contraintes naturelles : vallée encaissée (surtout au Liban) ou cours serpentin (plaine de Homs et de Hama) ou encore zones marécageuse (le Ghab en Syrie centrale). Pourtant il reste l’axe autour duquel s’articulent la vie et l’économie du Levant du Nord, où il abrite environ 5,7 millions d’habitants. La vie urbaine s’est développée le long de son chenal ou dans son bassin, depuis l’Antiquité : Emèse (Homs), Épiphanie (Hama), Apamée et Antioche, et bien d’autres moyennes ou petites villes. Ses eaux, bien que peu abondantes (13 m3/s à son entrée en Syrie), ont donné naissance à l’un des paysages caractéristiques de la Syrie, « les jardins sur l’Oronte », qui se sont développés grâce aux aménagements hydrauliques antiques et modernes : barrages, qanats, norias, canaux d’irrigation.

Cette présentation tente de mettre l’accent sur les contraintes qu’a affrontées l’homme pour s’installer ou fonder des villes dans le bassin de l’Oronte et y développer des activités, notamment dans la partie moyenne de la vallée correspondant au cours du fleuve en Syrie. « Le fleuve qui coule à l’envers » m’explique Toufic Mazloum

Comme pour les fleuves voisins, le Tigre, l’Euphrate ou le Jourdain, aucun des pays qu’il traverse n’a réussi à donner un statut juridique aux eaux de l’Oronte, engendrant ainsi tensions et affrontement dans une région marquée par le manque d’eau. Un accord a toutefois été signé entre la Syrie et le Liban (sous son contrôle) pour répartir les eaux de l’Oronte à hauteur de 90 % pour la Syrie et 10 % pour le Liban.

Molière a repris le nom Oronte trois fois : dans L’École des femmes où Oronte est le père d’Horace et un ami d’Arnolphe ; dans Le Misanthrope où il aime Célimène ; enfin dans Monsieur de Pourceaugnac où il est le père de Julie.

#education #psychanalyse #HP #HautPotentiel

21 Déc

Que dire de ces deux lettres H et P ?

Je constate que, régulièrement, ils ont mis les doigts dans la prise…

Qu’on dise reste oublié derrière ce qui se dit dans ce qui s’entend.

Quel potentiomètre choisir ?
Résistance variable et curseur réglable…

Le potentiomètre, d’un dispositif à trois bornes avec un élément de résistance accessible, assure une fonction de diviseur de tension via son curseur réglable par l’utilisateur sur un arbre rotatif.

Il est utilisé dans d’innombrables circuits à signaux mixtes et analogiques pour répondre aux exigences d’une grande variété d’applications : éducation, société, politique…

Certains pensent le remplacer par une résistance variable prétextant d’une possible division de tension.

Il est à considérer que la haute tension présente potentiellement des risques accrus en termes de sécurité, car les décharges électriques à ces niveaux peuvent causer des blessures graves voire mortelles.

Les équipements et les installations destinés à fonctionner à haute tension doivent être conçus, entretenus et exploités avec une extrême prudence et par des professionnels qualifiés pour minimiser les risques.

Une différence de potentiel est nommée tension électrique.

Un rappel non pas tant à la mémoire que, comme on dit : à l’existence.

À bon entendeur.

#Alger #Algérie 2ème Congrès de #pédopsychiatrie / 16 et 17 novembre 2023 / #psychanalyse #Education

25 Oct

2ème Congrès National de Pédopsychiatrie

Les 16 et 17 novembre 2023

« MALTRAITANCES
À L’ENCONTRE DES ENFANTS ET DES ADOLESCENTS:
prévenir, repérer et agir. »

Hôtel Sofitel

psychanalyse

J’aurai le plaisir de présenter la communication suivante :

 » Pourquoi le déni de la sexualité infantile est-il un facteur majorant les maltraitances sur enfant ? « 

Résumé:

Une question semble particulièrement opérante dans la quotidienneté des institutions scolaires, hospitalières ou sociales : l’imaginaire d’un monde paysan, au plus près de la nature, pourrait-il protéger les enfants et les adolescents ? Les réseaux sociaux et les fantasmes sexuels sous-jacents ne viennent-ils pas infuser, dans l’intimité de la chambre de l’enfant ?
La psychologie dite positive et la bienveillance pourraient-elles devenir le déplacement de la séduction inconsciente ?
L’Institution, contrainte au discours du bien-être ineffable, peut-elle devenir maltraitante en ne jouant pas son rôle de pare-excitation ?

Penser la sexualité infantile est-il encore de son temps ?

Claude BREUILLOT
Psychanalyste
Docteur en psychologie clinique – Université de Franche-Comté
Expert Judiciaire

#Taxidermie #psychanalyse #anthropologie

1 Oct

Congrès d’Analyse Freudienne à Paris

30 septembre et 1er octobre 2023

Qu’est-ce que l’A(a)utre ?

Claude Breuillot 

Psychanalyste

Twitter : @cbreuillot  e-mail : cbreuillot@gmail.com  

Blog : psychanalysebourgogne.wordpress.com

Taxidermie et psychanalyse. Figures de l’Autre ?

Animal sacralisé, divinisé, animal fétiche, animal totem, les représentations animales ne manquent pas depuis la nuit des temps, peints sur les parois des cavernes ou sur celles, moins matérialisables, de notre inconscient. L’élucidation du phénomène marquera le Totem et tabou, de Freud. L’analyse du petit Hans, voire L’homme aux loups, L’homme aux rats,ont attiré son attention sur l’importance des animaux (des chevaux dans le cas de Hans) dans la névrose infantile, avec l’identification « totémique », entre animal et père de la horde.Freud avait pris un grand intérêt à la lecture de Totemism and Exogamy de James Frazer, paru en 1910. De fait, s’il est un ouvrage de Freud qui prend en compte la littérature anthropologique de son époque, c’est bien Totem et tabou.

La domestication de l’animal fut une étape cruciale. Il est à noter que crucial dérive du latin crux, crucis, « croix » en français, cruz en espagnol. « La domestication ne va pas de soi » explique l’archéozoologue Denis Loirat. « Les premiers animaux sont des animaux sauvages qu’on va commencer à contrôler, et donc d’abord à isoler du troupeau sauvage. On va commencer à les parquer, à les isoler, à les soigner, à les nourrir, à contrôler les naissances. Alors, ça ne se fait pas sur quelques années, évidemment, il faut attendre une centaine d’années pour percevoir un changement au niveau génétique, qui va se traduire pour nous, archéozoologues, au niveau anatomique, puisque c’est principalement ce qui va nous rester à observer lors des fouilles archéologiques. Ce processus de domestication entraîne une réduction de la taille des animaux, principalement des mâles, ce qui réduit la distinction entre les mâles et les femelles. Ce qu’on appelle le dimorphisme sexuel. Au départ, ce n’est pas évident de distinguer un animal sauvage d’un animal en cours de domestication… » 

La domestication,  à entendre comme signifiant du contrôle et de la maîtrise, pour satisfaire aux besoins alimentaires, mais concomitamment, mettant en exergue la temporalité, établir des liens qui restent à analyser entre l’enfant et l’animal.

La domestication du cheval ne fut ni plus ni moins qu’une Révolution dans la grande aventure humaine. Sans le cheval, pas de vitesse, pas d’exploration, pas de conquête… 

L’anthropologue et dramaturge, Valentine Losseau a étudié et vécu, par intervalles pendant sept ans dans les forêts du Chiapas, au Mexique. Elle rencontre les indiens Lacandon où chaque enfant, à la naissance, se voit attribuer un totem animal, une créature qui existe à la fois dans le monde physique et dans le monde souterrain. Les Lacandons se divisent en groupes, dont chacun se rattache à un animal. Le phénomène de la Prägung (en anglais : imprinting, en français, empreinte) aurait dû, à nos yeux, retenir très vivement Lacan. Tous les hommes vivant au même endroitportent généralement le même nom d’animal ou nom totémique. L’individu portant un nom totémique différent était chassé de son propre groupe et recueilli par un autre.

Il existe donc un clan « singe », un clan « sanglier », un clan « singe à tête blanche »,…

Le totémisme s’accompagne de l’interdiction de consommer le totem et de l’exogamie. Or la prohibition de consommation ne joue pas chez les indiens Lacandons : les « singes » sont même leur plat préféré. Si on leur reproche de consommer un « parent », ils répondent que ce parent est bon à manger, et que rien ne leur défend cet usage. Un signifiant représente un sujet pour un autre signifiant. « L’exogamie est respectée d’une façon presque totale : j’ai vu, écrit jacques Soustelle, un cas d’homme « sanglier » marié avec une femme du même totem. D’une façon général, les « singes » épousent desfemmes « sangliers », et les « sangliers », des femmes « singes ». » 

L’humanité, écrit Freud, a produit, au cours des temps, trois systèmes de pensée ou trois grandes visions du monde : l’animisme (mythologique), la religieuse, la scientifique. Parmi elles, la première créée, celle de l’animisme, est peut-être la plus conséquente et la plus exhaustive. C’est un système de pensée qui permet de concevoir à partir d’un seul point, le tout du monde, comme un unique ensemble cohérent et qui laisse des traces dans la superstition, dans le fondement de notre parler et de notre croire. Freud soulève dans Totem et tabou, la question de la pensée magique. L’animal envahit les croyances : l’animisme est la croyance que toutes les choses naturelles, telles que les plantes, les animaux, les roches et le tonnerre, ont des esprits et peuvent influencer les événements humains. « Animisme » vient du latin anima, « âme » mais aussi « animé » – qui donnera le mot « animal ».

« Le premier animal domestiqué est le chien, mais il ne l’a pas été de manière intentionnelle. On estime que la transition s’est opérée il y a au moins 17 000 ans, soit bien avant l’apparition de la sédentarisation ou de l’agriculture. À cette époque, l’être humain et le loup, dont le chien descend, sont des prédateurs dont les terrains de chasse se croisent. »

 

Le bestiaire peuplant l’espace de la cure ou le champ psychanalytique ne manque pas d’originalité. De la naissance à la mort, les animaux se présentent à nous dans les interstices, souvent énigmatiques et équivoques, du quotidien : nos rêves, nos fantasmes, nos discours, nos investissements d’objet…

Au détour des contingences, il sera médium, surface de projection, objet spéculaire, sublimation, objet sexuel,…

 

La nosographie ne manque pas de l’épingler : la zoophilie, la phobie des araignées, la phobie des chevaux chez le petit Hans.

 

Les pulsions scopiques et épistémophiliques ne sont pas étrangères à notre objet d’aujourd’hui : la taxidermie. On ne peut ne pas penser à la pulsion invocante, proposée par Lacan. L’acte taxidermique vient-il faire écho à des conflits psychiques inconscients ? « L’entre-deux morts ne se rencontre pas  au coin de la rue, il faut-être, dit Lacan, « à bout de course », confronté au tragique, confronté à la coupure du langage, constitutif du sujet divisé, dit-visé par le chasseur photographique, chasseur d’image croisant le chasseur d’animaux. Si l’inconscient, c’est le désir de l’Autre, l’animal, par déplacement, pourrait-il être une figure de cet Autre ?

Mansion, c’est la demeure du dit de la vérité de la jouissance.La taxidermie pourrait catalyser l’image, condenser les dits-mansions plurielles du manque et de l’angoisse de castration, polariser le regard, par l’exhibition d’un corps constituant une limite, une sorte de divinisation de la limite où l’être subsiste dans la souffrance non symbolisée, la sourde  plainte. « Ces trois « ditmansions », telles que je les écris, s’appellent le Symbolique, l’Imaginaire et le Réel. »

« J’aurai ta peau ! » pourrait s’exclamer le sujet en attente de l’acte taxidermiste, un retournement possible sur le corps propre, de la pulsion de mort.

Peut-on parler de passage à l’acte taxidermique ? 

A propos du suicide d’Empédocle qui «laisse à jamais présent dans la mémoire des hommes cet acte symbolique de son être-pour-la-mort», Lacan, dans les Écrits, affirme que «le renoncement suicide du vaincu frustrant de sa victoire le maître qu’il abandonne à son inhumaine solitude», est l’expression la plus haute de la liberté du désir : «cette affirmation désespérée de la vie qui est la forme la plus pure où nous reconnaissions l’instinct de mort. » Rien de plus pur que le suicide et le désespoir. Rien de plus pur pour un être, que, au-delà de la stase que représente la souffrance, de «rentrer dans le néant d’où il est sorti». Qui est le maître Anubis ou ce que représente le chien comme signifiant ?

 

Les fondations de la taxidermie, l’art de préserver des animaux et de leur donner l’apparence de la vie, ne sont-elles pas induites pas l’essor des sciences dites naturelles dans un souci d’identification et de transmission ? Quelles sont les différentes possibilités de conservation de spécimens ?Dérivée de recettes et méthodes de la momification orientale, élaborée essentiellement entre les XVIIe et XVIIIe siècles, il ne reste presque rien des premières productions, hors quelques spécimens spectaculaires : un crocodile du Nil en Italie, daté de 1530 et une série de chevaux, en Hollande et Allemagne, entre 1600 et 1690. La taxidermie est une technique moderne, née du besoin qu’avaient savants et érudits de la Renaissance de préserver les organismes qu’ils décrivaient et comparaient. Si garder une plante, ou même un insecte, s’avère assez facile par la technique de la mise en herbier (on essaiera aussi l’herbier de poissons au début du XVIIIe siècle), presser des Vertébrés que l’on souhaite garder entiers entre des couches de papier s’annonce malaisé.

 

Nous pouvons rapprocher ces pratiques taxidermiste des concepts de zoopolitique de Derrida ou de biopolitiquede Foucault. La zoopolitique, l’un des derniers concepts inventés par la déconstruction derridienne, a été abondamment décrite, analysée et mise en perspective lors des dernières années du séminaire de Derrida avant sa mort. Ce dernier séminaire, paru en deux volumes sous le titre La Bête et le souverain. La zoopolitique est porteuse de violence et de mort.

 

 

« Ce que le motif de la différance a d’universalisable au regard des différences, c’est qu’il permet de penser le processus de différenciation au-delà de toute espèce de limites : qu’il s’agisse de limites culturelles, nationales, linguistiques ou même humaines. Il y a de la différance (avec un « a ») dès qu’il y a de la trace vivante, un rapport vie-mort, ou présence/absence. Cela s’est noué très tôt, pour moi, à l’immense question de l’animalité. Il y a de la différance (avec un « a ») dès qu’il y a du vivant, dès qu’il y a de la trace, à travers toutes les limites que la plus forte tradition philosophique ou culturelle a cru pouvoir reconnaître entre l’homme et l’animal. » dira Jacques Derrida dans un entretien avec Élisabeth Roudinesco.

 

La momification des Egyptiens, le plus ancien procédé utilisé, était une opération complexe, composée de plusieurs étapes : dessèchement des corps éviscérés avec le sel et le natron, enveloppement de fines bandelettes de toile, engluement de bitume et bourrage du ventre d’herbes mêlées de baume. Après tout cela, les corps étaient déposés dans des sarcophages pour éviter l’évolution de la destruction des tissus. Les mêmes principes étaient applicables pour les animaux.

Le premier atelier important de taxidermie, Rowland Wards, fut créé à Londres vers 1850. Dans le même temps, les réalisations des ateliers Deyrolle ou des frères Verreaux à Paris connurent un certain retentissement. Cette époque coïncidait avec le mouvement romantique et les taxidermistes, comme les artistes qui leur étaient contemporains, furent inspirés par les récits rapportés par les voyageurs naturalistes. Leurs montages exhibaient des fauves aux allures désinvoltes et expressives qui témoignaient bien du rapport entre l’animal et les hommes de cette époque. La peau est retirée et débarrassée de ses impuretés dans un bain d’acide. Les dents, les cornes ou les bois sont nettoyés puis séchés. A l’aide d’une armature en fil d’acier, en bois ou en mousse, le taxidermiste reconstitue ensuite le plus précisément possible la structure de l’animal.

Il est à considérer, dans l’Egypte ancienne, les différences entre deux types de dévotion autour des animaux : le culte des Uniques et celui des Multiples :

 

   Les Uniques : certains animaux étaient, en effet, considérés comme des hypostases du dieu sur terre, un équivalent des statues de culte, réceptacles terriens de la divinité. Après sa mort naturelle, l’animal était momifié et inhumé avec tous les honneurs, puis on recherchait son successeur. L’animal devait, en effet, répondre à des critères physiologiques précis (pour un bœuf par exemple, couleur du pelage, certaines taches précisément disposées sur le corps…). Le nouvel « élu » allait alors passer sa vie au sein du temple, dans un enclos luxueux. L’Unique le plus célèbre est sans nul doute le taureau Apis au Sérapéum de Memphis dont le culte a perduré de l’époque thinite jusqu’à l’époque ptolémaïque et qu’Hérodote décrit dans son Enquête. Mais il en existe d’autres comme les taureaux Mnévis et Boukhis ou les béliers de Banebded et d’Éléphantine.

 

   Les Multiples : les animaux momifiés en « masse » sont un phénomène qui se développe surtout pendant les époques tardives. Les temples élèvent dans leurs enceintes des centaines d’animaux qui sont destinés à être offerts par des particuliers en « ex-voto » (cadeau votif) à la divinité, ce qui entraîne le développement d’immenses catacombes animalières (comme à Saqqarah). On possède des témoignages illustrant notamment l’existence de grandes volières à ibis (Tounah el-Gebel), ou encore des traces archéologiques de « couveuses » pour les œufs de crocodile (Médinet Mâdi). Les études pratiquées sur ces momies démontrent que les animaux pouvaient être abattus (on a par exemple découvert des momies de chats qui étaient en fait remplies de plusieurs chatons) ou l’on pouvait sélectionner seulement une partie du corps de l’animal (comme des « momies » constituées exclusivement de pattes d’ibis). Ce véritable commerce, sans doute très rentable pour les temples, a d’ailleurs entraîné des abus et on a des attestations de procès contre des prêtres qui avaient vendu de fausses momies. La demande d’animaux destinés à cet usage, bien plus élevée que l’élevage ne pouvait en offrir (plus de soixante-dix millions auraient été embaumés), conduisit les embaumeurs à se contenter de « parties » de l’animal, ou même d’objets s’y rapportant (seule une momie sur trois contenait un animal complet, et un autre tiers ne contenait qu’un morceau de l’animal).

 

 

La naturalisation :

 

​Concernant le fil de ces réflexions biopolitiques, il est à considérer la naturalisation comme modalité identitaire et ses conditions fixées par la loi, selon trois modes d’acquisition : 

• par déclaration (notamment mariage)

• par décret (naturalisation)

• automatique, sans formalité (de plein droit).

La « naturalisation par décret » est l’une des procédures qui permet de devenir citoyen français. « Le marquage sémantique et symbolique, de même que la pertinence pratique de cette différenciation primaire entre Français et étrangers composent en fait le cadre élémentaire dans lequel s’inscrivent les procédures de naturalisation. »

 

 

Quant à préserver son animal de compagnie après sa mort ? Une figure de la mélancolie ?

La taxidermie comme métaphore de l’attachement, de l’aliénation et de l’idéal ?

 

Le trompe-la-mort, le partenaire de l’errance, le complice, je le rencontrerai autour d’un texte d’Olivier Douville, évoquant le punk à chien. « Alors je parle du chien, je lui demande comment  va son chien… et j’entends toutes les conneries d’usage : « vous savez, les chiens, c’est bien, c’est meilleur que les humains ». Je continue : « Ah oui, c’est bien, votre chien vous aime bien, vous l’aimez bien, vous en prenez soin ». Et il me dit cette chose extrêmement sidérante : « J’entends mon chien, il est sympa parce qu’il rêve de moi ». Ça, je vous assure, c’est assez original. Aussitôt, dans une espèce d’impatience infantile, notre stagiaire annonce : « voilà un beau cas de psychose ». J’ai beau secouer le D.S.M. – ça a au moins une vertu, ça fait des muscles c’est épais – ou mes traités de psycho-pathologies, je n’ai jamais entendu parler de folie à deux avec un rottweiler. C’est peut-être parce que les psychiatres ne fréquentent pas assez les salons canins, je ne sais pas. Ce que je sais en revanche, c’est que, dans ces cas-là – et n’oubliez pas que c’est quelqu’un qui n’est pas au pire de l’errance – un sujet… – et il n’est pas plus fou que moi- … peut tout à fait déléguer ce que Freud appelait sa libido (non pas l’énergie vitale mais le désir de l’énergie vitale), sa psyché, à un poids extérieur qui se trouve être l’animal. Et il peut montrer non sans fierté qu’il prend soin de cette vie extérieure à laquelle il confie, sans délire, le soin de rêver à sa place. Evidemment, il ne nous a jamais raconté que le chien lui racontait ses rêves ni qu’il mettait son chien sur un divan pour toussoter ou entre deux sursauts servir d’interprétation géniale qui fait bouger la structure. »

 

L’aliénation, selon Lacan, c’est l’aliénation au signifiant. 

 

La taxidermie participe d’un imaginaire : les spécimens ont une grande valeur et doivent être considérés comme témoignage et mémoire matérielle à léguer aux générations futures. Sur le plan symbolique, la pratique rencontrait le désir d’enseigner. L’attention subjective donnée à l’animal, trans-figuré, deviendrait, par substitution, la rencontre possible entre des êtres qui désespèrent de la présence humaine dans le Réel. Est-ce une histoire sans paroles ? 

 

Depuis la plus haute antiquité, les hommes ont été tentés par les essais de conservation du corps humain ou des animaux. Dès la préhistoire, la plupart des animaux vivant dans l’Égypte antique furent sacralisés et idolâtrés. Ils étaient considérés comme des incarnations vivantes de principes divins et furent associés à des divinités.

 

Anubis (prononcé [a. ny. bis]) est un dieu funéraire de l’Égypte antique, maître des nécropoles et protecteur des embaumeurs, représenté comme un grand canidé noir couché sur le ventre, sans doute un chacal ou un chien sauvage, ou comme un homme à tête de canidé.

 

Anubis Repetita (25 ans)

 

Je souligne la répétition comme symptôme et parole avortée. Quelles sont les visées scopiques, spéculaires, de ce chasseur ? 

 

Anubis vit une rupture annoncée avec sa compagne. Elle est celle qui, à son insu,  réactivera les angoisses massives de cet homme.

 

L’iconodoule, aux confins de la crise clastique (Du grec ancien κλαστός, klastos (« brisé ») avec le suffixe -ique.), dévasté par une terreur sans nom, au risque de l’épuisement et de l’effondrementpsychiques, viendrait se soutenir inconsciemment de ses images tutélaires. Il vit la rencontre avec sa compagne, se soutenant d’une sécurité imaginaire : une assurance tous risques. Elle est sûre d’elle, le prend en main. Il est prêt à tout donner. Son frère ainé l’humilie. Ils sont ensemble en GAEC, le père d’Anubis et ses deux fils.

 

Anubis, mannequin clastique, expurge les réminiscences martyrisantes et immanentes figurant les images en souffrance, les lettres de son désir sans adresse.

Son prêche, indicible, incertain,imprègne le quotidien de sa spiritualité privée. Soumis à des mouvements radicaux au risque de lui devenir fatal, Anubis se trans-figure en bourreau de lui-même, contraint à une jouissance dévastatrice et mortifère. Je le reçois à mon cabinet, suite à une hospitalisation en Centre Hospitalier Spécialisé,pour palier à ses pensées suicidaires. Chacun craint pour sa vie. Il résiste aux images qui le persécutent.

 

Il évoque son incapacité à cuisiner, à la surprendre, à vivre dans la maison en son absence quand elle rentrait tard du travail. Lui, mangeait chez ses parents qui habitaient à proximité. Avec Anubis, la vie est un rituel mortifère ; chronicisé par des étapes répétées, comme s’il cochait, chaque matin en se levant, les mêmes cases. L’ennui s’installe dans le couple et le désir de sa compagne s’estompe. Elle souhaite faire chambre à part, rendant déterminant l’écart et le lien, l’inscription de l’absence et de la présence. L’Un menaçant est mis à mal, relégué au bord du lit ;  ils deviennent étranger. Le couple, leur entente fragile et incertaine, comme ensemble fictif, n’est plus. L’un « unien » ne tient plus et vient déstabiliser l’unité de l’être. Qu’adviendra-t-il,comme destin, de ses pulsions ?

 

Les premiers mois d’analyse sont frappés du sceau des pensées suicidaires. Il sera hospitalisé par deux fois pendant son analyse.

Sa mère m’appellera, au moment où elle le fait hospitaliser. Elle me dit que c’est la première fois que son fils Anubis parle de son thérapeute à ses parents. C’est lui qui lui demande de m’appeler. Elle s’insinue, tente d’interférer, paie parfois les séances d’Anubis.

 

Dix mois passent, pendant lesquels Anubis est ponctuel à ses séances. Le transfert de l’analyste permet d’établir un cadre sécurisant, une attention subjective et flottante.

 

J’entends, au cours du fil de ses associations, un autre en creux, un absent, une place manquante.

 

Il arrive à sa séance, agité, ne me regarde pas ; il a beaucoup bu entre les dernières séances. La maison du couple est vendue. Il a fallu signer chez le notaire. Anubis culpabilise de n’avoir pas été à la hauteur de cette femme idéalisée. 

 

Je lui demande s’il vient de se passer un événement qui pourrait lui sembler anodin. « Je viens de ramener le chien. » énonce-t-il après un temps d’hésitation, de doute.  Depuis la séparation, ils s’échangent le chien chaque semaine, ce que les couples divorcés nomment : passage de bras quand ils déposent l’enfant chez l’autre parent.

 

Je lui demande de me parler de son chien. Il évoquera la chasse, les rapports singuliers avec son animal qui suivait la voiture dès qu’il quittait la maison. Ce chien qui l’entendait arriver de loin et qui l’attendait sur le pas de porte en lui faisant, comme on dit, la fête. La séparation consiste dans l’inclusion du sujet dans ce reste déchu. Lacan en donne l’exemple, dans le Séminaire XI, avec le fantasme infantile de sa propre mort. « Est-ce qu’il peut me perdre ? » est la question de l’enfant face à l’énigme qui lui arrive de l’Autre. Le chien l’accompagnait à ses séances d’analyse. Il restait dans le pickup.

Anubis et son chien, leur « organisation passionnelle », écrit Lacan, ne font qu’Un, produisant une unité indivisible, dans un regard partagé. Le chien remplace l’image dans le miroir. « Le stade du miroir ne s’achève, pour Lacan, que lorsque ce qui a tété trouvé à s’identifier à l’image dans le miroir se retourne et va s’identifier à ce signe de l’assentiment, cet einziger zug, qui l’introduit de plein pied dans le symbolique et son déploiement indéfini d’unités discrètes. » Quels ont été les avatars de l’assentiment, pour Anubis ?

 

Peut-on dire que le chien s’identifie aux signifiants d’Anubis ? Au trait unaire ? Une forme de duplication sans duplicité, mais non sans  ubiquité, dans l’omnipotence, l’omniprésence de l’un et l’autre, qui soulignerait une symbiose. Il est à entendre le signifiant d’une diplopie essentielle au désir, à laquelle il est impossible d’échapper : dans la dialectique de la demande et du désir, le sujet prend toujours l’ombre pour le vrai. Processus qui implique aussi bien la falsification du sujet que de l’objet du désir en question.

 

Nous pourrons nous référer aux travaux de l’éthologue autrichien Konrad LORENZ, interrogé dans son bureau au « laboratoire » de Seewiesen en Haute Bavière. Ses observations sur les oies lui ont permis de formuler des lois sur leurs comportements. Il donne des exemples, sur la fidélité des oies et sur leur jalousie. « Les réactions sexuelles d’un canard colvert élevé en compagnie d’un tadorne ne se fixent pas sur cet exemplaire précis de Tadorna tadorna L, mais sur son espèce. Placé devant le choix entre de nombreux tadornes, le sujet ne choisit presque jamais « son partenaire d’empreinte » – les mécanismes inhibiteurs de l’inceste l’en empêchent – mais un autre représentant de l’espèce. Un choucas que j’avais élevé moi-même et dont le comportement sexuel était par conséquent fixé sur l’homme, orienta son comportement de pariade autour d’une petite fille brune. Je n’ai jamais pudécouvrir ce qui avait bien pu pousser l’oiseau à nous considérer tous deux comme des représentants d’une seule et même espèce. »

 

Par ailleurs, pour Bowlby (1958), le lien d’attachement permet à un organisme non encore autonome de recevoir protection et soins de la part d’un organisme mature, habituellement le parent biologique. Selon cette logique, quand l’organisme estmature, on pourrait s’attendre à ce que le processus d’attachement disparaisse puisqu’il n’est plus nécessaire à sa survie.

Lehotkay (2002) a découvert une correspondance entre les groupes de maîtres et les groupes de chiens, comme le prédisait la théorie de Bowlby (1969) : ainsi, plus les maîtres évitaient la proximité, plus leurs chiens 1′ évitaient aussi, etinversement. En conclusion, la recherche de Lehotkay (2002) a montré que la relation d’attachement entre le chien et son maître est semblable à une relation d’attachement entre un enfant et sa mère par le fait que leurs patrons d’attachement concordent.

 

Nous pouvons entendre les intrications pulsionnelles entre le maître et son chien. 

En début d’analyse, il avait évoqué son enfance, avec sa mère qui le posait au pied des premiers ceps, pendant qu’elle, taillait la vigne pendant des heures. En grandissant, il jouait en gardant en ligne de mire sa mère, scrutant sa position dès qu’elle s’accroupissait.

 

Anubis, l’écorché vif, le dépiauté, avait pu me dire comment ses années d’internat avaient été un supplice.

 

Anubis, son chien, son semblable, le « Nebenmensch », « il l’a dans la peau ».

 

Son chien n’est pas un chien. La chaîne signifiante est marquée de temps morts. Au niveau paradigmatique, un signifiant pourra prendre la place d’un autre. Il évoque une sœur. Il en est sûr. Il a entendu qu’il y avait eu un autre enfant. Une fille. Il ne peut pas demander à sa mère. Il ne se représente pas si cette sœur aurait pu naître, si elle est mort-née, ou encore si elle était née avant ou après lui.

Mais la séance suivante, il évoque l’autre chien. La valeur d’échange que représente celui-ci n’était qu’un écran qui dissimule ou protège des marques d’une rupture ancienne. La mort de la sœur ? Non. Le moment n’est pas venu.

En fait, ce sera la mort d’un autre chien dans des circonstances particulières,  dont Anubis souhaite parler.

 

Pendant de nombreuse séances, je complèterai, grâce à Anubis, mes connaissances sur la chasse. Il me dit qu’il l’a fait empailler. Le chien reste chez ses parents, sous le regard.

Quelles sont les circonstances de sa mort ?

Son ami et complice de chasse lui avait offert ce chiot issu d’une portée qu’Anubis a vu naître. Un week-end, son ami lui empreinte ce chien pour débusquer des ragondins. Anubis hésitera, mais il a confiance en son ami. Le chien ne ressorti pas des boyaux. Le milieu de prédilection du ragondin recouvre les bords de fleuves, de rivières, les marais, les canaux, les étangs, les mares, les fossés remplis d’eau plus ou moins stagnante. Là, il creuse son terrier qui comporte plusieurs entrées dont une sous l’eau.

Le ragondin a été introduit en France dans les années 1880 pour sa fourrure et est devenu une espèce invasive, raison de sa classification comme « nuisible aux végétaux en France ». Mais je me laisserai surprendre à l’évocation de la technique de chasse. Il arrive très souvent que le chien ne s’extirpe pas des terriers creusés. Anubis a l’habitude de poser un linge chargé de son odeur à une des entrée, comme on peut faire en service de néonatalogie pour des enfants en couveuse. Anubis retrouve régulièrement, le lendemain, le chien, sur le linge, qui attend.

Lors de cette partie de chasse, Son ami ne lui a pas dit le soir même, que le chien était resté piégé, coincé. À l’annonce, le lendemain, de l’absence du chien, Anubis loue une pelle excavatrice et découvre les deux animaux étouffés.

La découverte macabre de la dépouille sans vie provoqua un effondrement et un état de sidération. 

Il ramène son compagnon à 4 pattes – lui ou son compagnon ? – et se rapproche d’un taxidermiste. 

Ces évocations émaillent toujours les séances. Je lui demande le lieu où il a déposé cette relique ? Anubis développe, petit-à-petit, ce qu’il découvrira advenir, sa vénération, comme désir inconscient. Il demande au taxidermiste de créer une scène à deux figuresmythiques : le renard et son chien. Il me montrera, sur son portable, une photo de cette scène, déposée sur une planche dans le caveau familial ; ils sont viticulteurs. Il garde précieusement  de nombreux animaux morts au congélateur.

« Une relique peut devenir fétiche et inversement, en fonction du devenir relationnel avec l’objet. Dès lors, écrit Jean-Clément Lavieille, l’objet conservé se présente doublement tant qu’objet bi-fide, pris dans une double foi « bi-fides » ; un premier aspect,intime et un second, social. Le dispositif reliquaire entoure à la manière d’un discours : il est le garant, soit d’un renoncement, soit d’une exposition. »

 

En guise de conclusion

 

​La mort du chien vient-elle présentifier, re-présenter, l’autre mort, celle de sa sœur, ou la perte de l’accordage subjectif avec sa mère ? Lacan nomme « sujet aliéné », le « sujet divisé». 

Il est en même temps le « moi », image fictionnelle du sujet, et le « je », sujet de l’inconscient. Pour le dire brièvement, le « moi » et le « je » sont une façon d’appeler les deux côtés du sujet, divisé dans son rapport à l’Autre. Ils représentent la structure propre au langage : le premier « sujet de l’énoncé », le second « sujet de l’énonciation ». Dans ce sens, Lacan affirme que le sujet est aliéné par l’image et par le signifiant. Ce qui signifie qu’il sera toujours « aliéné », dans la mesure où il faut qu’il se fasse représenter dans la langue et par la langue.

 

Anubis traverse-t-il un deuil impossible de l’objet maternel ? Impossible en raison de quelle défaillance paternelle ? 

 

La perte de l’objet aux confins de la stupeur mélancolique indique-t-elle une faillite des signifiants ? Dans Deuil et mélancolie, Freud parle du suicide mélancolique en rappelantqu’un suicide visait toujours quelqu’un d’autre.

 

Anubis vient d’acheter une nouvelle maison. Il ne peut y dormir seul, pour l’instant. À la place de la mort, sera-t-il en mesure de produire de nouveaux artifices , un « au-delà », une sublimation, non périssable ; une ex-tasis. Pourra-t-il exister une survivance à la perte de l’objet ?

« Nommer la souffrance, l’exalter, la disséquer dans ses moindres composantes est sans doute un moyen de résorber le deuil », dépassant le processus inconscient de sacralisation, en le symbolisant.

Pour Anubis, singularité rime avec isolement et sidéralité du vide, une pesanteur du présent, dont il est en passe de s’extraire. 

Se distinguant de la position de Heidegger pour qui le Daseins’inscrit dans l’horizon de sa propre mort, Bataille va situer l’expérience du sens primordial de l’existence dans la rencontre avec la mort d’autrui.

Dans Histoire de l’œil, le sentiment associé au spectacle de la mort renvoie au sentiment amoureux entre les protagonistes. Ce passage de l’Histoire de l’œil de Bataille est à cet égard fort évocateur :

« Ainsi commencèrent entre nous des relations d’amours si étroites et si nécessaires que nous restons rarement une semaine sans nous voir. Nous n’en avons pour ainsi dire jamais parlé. Je comprends qu’elle éprouve en ma présence des sentiments voisins des miens, difficiles à écrire. Je me rappelle un jour où nous allions vite en voiture. Je renversai une jeune et jolie cycliste, dont le cou fut presque arraché par les roues. Nous l’avons longtemps regardée morte. L’horreur et le désespoir qui se dégageait de ces chairs écœurantes en partie délicates, rappellent le sentiment que nous avons en principe à nous voir.

L’expérience de l’amour, pour Bataille, se rapporte fondamentalement à l’horreur et au désespoir : aimerquelqu’un c’est, en définitive, éprouver face à lui ou à elle, le sentiment de se tenir au bord de l’abîme.

L’acte taxidermique peut s’entendre comme sublimation en termes de créativité reliquaire. L’objet-relique navigue entre reconnaissance et rébellion face à la perte.

 

 

 

Pour citer cet article :

BREUILLOT, C. (2023), Taxidermie et psychanalyse : figures de l’Autre ?, psychanalysebourgogne.WordPress.com, Congrès international d’Analyse Freudienne; 1er Octobre 2023, Texte intégral, 18 pages.

 

 

 

#Paris #psychanalyse #politique

30 Sep

#StreeArt #Zlotykamien

Espace public : se faire voir pour mieux se faire entendre dans la cité ?

Pulsion scopique et pulsion invocante dans le street-art ?

La galerie Mathgoth présente une exposition rétrospective hors norme, à l’occasion des 60 ans des premières interventions de Gérard Zlotykamien dans la rue.

En 1963, Gérard Zlotykamien participe avec cinq autres jeunes artistes à la Biennale de Paris. Les portraits des dictateurs Salazar et Franco réalisés par Arroyo (membre du groupe) sont censurés par le Ministère de la Culture pour des raisons diplomatiques. Profondément indigné par cette décision qu’il juge injuste, Gérard Zlotykamien décide de prendre ses distances avec le monde de l’art et ses conventions. Il réalise que lors des expositions collectives, les artistes se battent pour que leurs œuvres soient le plus près possible des vitrines.

Alors, autant peindre directement à l’extérieur, là où on peut être le mieux vu : dans l’espace public. Sans le savoir, il donne ainsi naissance à ce qui deviendra le Street Art. Il trace avec frénésie dans les rues ses figures évanescentes qu’il appelle « Éphémères », qui peuvent être des ombres, des souvenirs, des hommages ou des fantômes.

Celui qui est surnommé affectueusement « Zloty » est né en France en avril 1940, ce qui, comme il l’indique dans sa biographie parue en début d’année, « n’est pas terrible pour un Juif ». Son enfance est en conséquence ponctuée d’incertitudes et de détentions successives.

Il vient d’une famille d’artisans, immigrés de Russie et d’Europe de l’Est. Son père est tapissier décorateur après avoir fait la célèbre école Boulle. Sa mère est la secrétaire particulière de l’éditeur Bernard Grasset.

L’enfant est âgé de 2 ans lorsque sa mère, sa grand-mère ainsi que ses oncles et tantes sont internés à Drancy. Son père, mobilisé, a déjà été fait prisonnier. Le petit Gérard est envoyé à l’UGIF, l’Union Générale des Israélites de France. Zloty devient selon ses mots, « le plus jeune prisonnier de France « . C’est Grasset qui réussit à l’exfiltrer.

Recueilli dans une famille d’accueil peu recommandable, Gérard manquera de tout : il échappe à la mort, mais grandit maltraité. Contrairement au reste de la famille, les parents de Zloty survivent à la guerre. Ensemble, ils réintègrent leur appartement du 14e arrondissement de Paris, mais Gérard va mal. Il évoque un « non-désir d’exister », dit-il.

Sans doute traumatisé par les événements passés et leurs réminiscences, Zloty demeure un enfant puis un adolescent particulièrement turbulant.

Gérard Zlotykamien est bien souvent le dernier de la classe. Mais il aime marcher. Ses longues promenades lui font découvrir galeries et musées.

C’est finalement le judo, où il a comme professeur un certain Yves Klein, puis l’art, qui donnent un sens nouveau à sa vie.

Adolescent, Gérard Zlotykamien est toujours aussi en colère. Révolté contre tout, il décide de quitter l’école et enchaine les petits boulots.

Employé le jour chez un marchand de meuble, il suit, le soir, les cours de Jean Prouvé au CNAM et fréquente l’atelier de l’argentin Carlos Cairoli.

Ses premières œuvres, réalisées avant même ses dix-huit ans, sont exposées à la galerie Cimaise en 1958 et comparées par un critique aux œuvres de Monet et Boudin. S’il s’agit en effet de paysages, le rapport avec ces maîtres du passé est très léger, voire inexistant chez Zlotykamien. Il abandonne d’ailleurs très rapidement ce genre artistique et se met à utiliser un outil inédit : la poire à lavement.

Mécanisme de défense contre la mélancolie ?

S’habiller comme tous les jours pour passer inaperçu. Une technique qui ne lui a pas réussi à tous les coups. Gérard Zlotykamien passera de nombreuses nuits en garde à vue. Il essayera même deux procès en l’espace de cinq ans. Le premier pour des graffs réalisés en Allemagne à Ulm en 1979. Lors de l’audience, Zloty se défend : « J’effacerai mes œuvres quand ils me rendront les miens », plaide-t-il.

Il écopera d’un non-lieu.

Deuxième procès en 1984 pour des « Ephémères » réalisés sur les murs extérieurs de La Fondation Nationale des Arts Graphiques et Plastiques à Paris. Zloty est condamné à 600 francs d’amende avec sursis. Ses courriers adressés au ministre de l’Intérieur, et à celui de la Culture n’y changeront rien.

Il est avec Daniel Buren, Ernest Pignon-Ernest et Jacques Villeglé, un des initiateurs de l’Art urbain en France.

Le #StreetArt conçu pour être accessible à tous, au regard de tous, est souvent considéré comme une « protestation silencieuse contre l’injustice », selon Bansky.

À voir !

#Paris Congrès 10/2023 / #VonKleist #criminalité #psychanalyse #criminalidad #Psicoanálisis

25 Sep

Preguntas a Jean-Jacques Valentin

¿Jean-Jacques Valentin levantó una liebre?

¿La mascarada de un asesinato premeditado disfrazado de crimen pasional?

A sólo una carta…

¿El don de la ubicuidad o el equívoco del asesinato?

Amistoso y animal se diferencian por una sola letra.

¿Los que dominan son siempre los otros? ¿Nos exoneramos por completo para incriminar a los demás?

Bruno Viard pondrá de relieve la competencia y la rivalidad. Lacan, releyendo a San Agustín, analizará la rivalidad entre hermanos y su ferocidad.

« Es cierto que otros han hecho grandes males, pero ser consciente de la ubicuidad del mal es saber que todo el mundo es al menos corruptible, aunque algunos hayan sucumbido más que otros ». Bruno Viard, sociólogo y lector de Paul Diel y Durkheim, escribe: « No puede haber fraternidad sin paternidad ».

Hacer regalos no necesita estar inscrito en los genes de la humanidad para constituir el óptimo universal de las relaciones. Es la única manera de satisfacer la necesidad de amistad que tienen todas las personas, como dice Jean Giono.

La pulsión de muerte rezuma en todas las etapas de la vida. Se detecta desde la cuna. Incluso es esencial no hacer oídos sordos. Anida en lo indecible y empuja a los más jóvenes por la ventana. Conocemos numerosos avatares ligados al pensamiento mágico y a las inscripciones equívocas de la sexualidad infantil.

Heinrich Von Kleist (1777-1811): La pérdida del padre:

Hijo de Joachim Friedrich von Kleist y de su segunda esposa Juliane Ulrike von Pannwitz, Heinrich fue confiado a un tutor en Fráncfort (Oder) y estudió con su primo Charles von Pannwitz. Leemos que Heinrich siempre admiró el sacrificio del soldado. ¿No fue su suicidio homicida llevado a cabo con una pistola, del mismo modo que los aristócratas reparan la humillación en los duelos, donde el ofendido prefiere retar al ofensor a un combate singular? Es una forma de intentar subjetivamente ajustar cuentas en una puesta en escena adaptada, una puesta en escena de la ob-escena, una formación del inconsciente.

El momento que desencadena los pensamientos que evocan la muerte para dos, una muerte intermedia, parece producirse cuando muere el padre. Su padre tenía dos hijas de un primer matrimonio, la menor de las cuales, Ulrike von Kleist (26/04/1774), era la favorita de Heinrich von Kleist, con la que mantenía los contactos familiares más estrechos y quien le apoyó económicamente en varias ocasiones. ¿Cómo fueron sus primeros años de relación? Ulrike tenía tres años cuando nació su hermanastro. ¿Vio el padre militar de Heinrich a sus hijas?

En 1788, cuando Heinrich tenía sólo once años, su padre, capitán del regimiento del Príncipe en Fráncfort, murió, dejando a su mujer y a sus hijos en dificultades económicas. La madre de Heinrich abandonó Alemania. En 1792, a la edad de 15 años, se alistó en el ejército prusiano como cabo del regimiento de la Guardia de Potsdam. Participó en el asedio y bloqueo de Maguncia. El 3 de febrero de 1793, a la edad de 16 años, perdió a su madre, Juliane Ulrike.

Hassoun escribió sobre el texto literario de Heinrich Von Kleist La marquesa de O: « Es después de estas pocas líneas, que introducen la historia y que nos ha parecido esencial retransmitir íntegramente, cuando se desarrolla el drama o la pasión de la marquesa de O. Atrapada en la agitación de las guerras napoleónicas, se encuentra víctima de un intento de violación en grupo por parte de un grupo de soldados rusos.

« En M.., importante ciudad de la Alta Italia, la marquesa de O., viuda de excelente reputación y madre de varios hijos perfectamente criados, anuncia a través de la gaceta que, sin explicar cómo, está embarazada, que el padre debe presentarse para reconocer al niño que dará a luz y que, por razones familiares, está decidida a casarse con él. La dama que, presa de una situación implacable, hizo tan extraño gesto con tanta tranquilidad, atrayendo así el escarnio público, era la hija del señor de G., gobernador de la ciudadela de M. ».

En aquella época, Napoleón I, recién coronado emperador de los franceses y victorioso en Ulm y Austerlitz en 1805, luego en Jena y Auerstadt en 1806, entró victorioso en Berlín, donde decretó el bloqueo continental. Kleist, detenido junto con sus amigos Karl Franz von Gauvain y Christoph Adalbert von Ehrenberg por los franceses, fue enviado como prisionero de guerra a Francia, donde fue encarcelado en Fort de Joux. En 1810, un año antes de su muerte, Kleist se vio impulsado por la esperanza de una coalición entre Prusia y Austria contra Napoleón, la figura del Gran Otro. En noviembre de ese mismo año, 1810, conoció a Henriette Vogel, una mujer casada que también era músico. Se suicidó en presencia de ella, en un jardín de Berlín, proponiéndole una puesta en escena adaptada a orillas del Wannsee (¿Le lac de quand?) . En tiempos modernos, ¿no habría acosado Heinrich a Henriette con mensajes de texto?

Dependiendo de si esta imagen real, por tomar prestada una frase de Jean-Jacques, recupera su poder de atracción al ser replegada sobre ella por el objeto que queda del goce, o si los rasgos arcaicos de la identificación han podido asumir la función de significante y ofrecer al sujeto un punto de vista regulador, se decidirá para el sujeto, para el sujeto, pues, si se beneficia de una imagen móica suficientemente segura para protegerle de los resurgimientos de un goce mortificante, o si, por el contrario, no tiene otra solución que una identificación con la huella de la desaparición del Otro, con una Nada del Otro aprehendida en el movimiento mismo de su desaparición.

El escudo de armas de la familia presenta una faja de gules sobre campo de plata entre dos zorros rojos en vuelo.

En 1800, Kleist se comprometió con una joven aristócrata, Wilhelmine von Zenge. Vivió algún tiempo en Berlín y mantuvo con ella un intenso intercambio de correspondencia. Kleist, que siempre se sentía inseguro sobre cómo conducir su vida, exigió a su prometida que le enviara su propio « plan de vida ». Esperaba de ella confianza absoluta y fidelidad ciega, escribió. Se comportaba con ella como un maestro y un tirano. Su estado físico y mental se deterioró, en el sentido militar de la palabra.

En el momento del asesinato, Heinrich reduce la distancia al mínimo y dispara a bocajarro. El objetivo estaba aislado y bajo control. Se ha obtenido su consentimiento.

En su opinión, ¿es la fabricación del consentimiento de su víctima un signo de su pulsión destructiva, un mecanismo de defensa subjetivo contra el colapso psíquico, una máscara de su dominación tiránica, radical y fanática?

Al asegurarse el consentimiento de su víctima, ¿puede suturar inconscientemente sus sentimientos inconscientes de culpa por la muerte de su padre? Henriette sabe que tiene un cáncer avanzado. Henriette, amante y madre, dejará la custodia de su hija a Madame Manitius antes de morir.

¿Morir con ella es una prueba de amor o un delirio para los dos?

¿Podemos identificar movimientos paranoicos de celos patológicos?

¿Le parecía que la muerte garantizaba un reencuentro definitivo entre padre, hijo y madre muerta, imagen especular de la muerte con un doble femenino?

¿Qué más podemos esperar? ¿Qué otra cosa? En la mañana de su último día, Heinrich von Kleist escribió a su hermanastra Ulrike: « La verdad es que no se me podía ayudar en la tierra ».

Hasta la despenalización de la muerte voluntaria en Francia en 1791, el suicidio se consideraba un crimen y un pecado, y el propio suicida estaba sujeto a severas penas legales, impuestas a su cuerpo y a su familia. Sólo una prueba inequívoca de demencia podía librarle de estas penas.

Véase Jean Étienne Esquirol, Des Passions considérées comme causes, symptômes et moyens curatifs de l’aliénation mentale, thèse de médecine de Paris, 1805, p. 5.

Claude BREUILLOT

Psychanalyste

Docteur en Psychologie Clinique

Expert Judiciaire

Pour citer cet article:

Breuillot, C. (2023), La mascarade du crime passionnel ou le meurtre mélancolique, Congres international d’Analyse Freudienne, Paris, 10/2023, 5 pages.