Archive | février, 2017
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#Paris 11 mars 2017 à 17h30 « Intervention publique du psychanalyste dans les #médias. »

21 Fév

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psychanalyse_bourgogne.wordpress.com de claude Breuillot est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International.

De la place du #feu dans la cure et de ses effets dans la #cité. #psychanalyse #sacré

20 Fév

 

Métamorphoses de la libido dans la culture.[1]

 

Claude Breuillot, psychanalyste / @clbr71

Travail préparatoire au cartel d’Analyse Freudienne : le psychanalyste dans la cité.

Mars 2017

[…] Prendre une vessie pour une lanterne, c’est-à-dire ce qu’on peut dire de mieux pour établir une confusion : une vessie peut faire une lanterne, à condition de mettre du feu.[…][2]

 

Pour qui les banlieues s’embrasent-elles ?

 

Quand l’angoisse de vivre et d’ex-sister est la condition tragique de l’être humain, la culture, l’éducation et quelques-uns vont-ils permettre enfin permettre une analyse de ces mouvements souterrains qui propagent la déliaison et la haine ?

Une patiente de 48 ans se remémorait un moment clé de son enfance. 3ème de 5 enfants dont l’ainé de 5 ans de plus qu’elle, et les deux derniers sont des garçons, elle évoque ce jour de ses 7 ou 8 ans où ils sont seuls hors du regard parental. L’un d’eux met le feu à du papier et le risque fût grand de mettre le feu à la chambre. Cette histoire aujourd’hui continue d’alimenter les questionnements parentaux, et perpétue le ciment fraternel du secret. Elle me dit qu’elle ne pourra jamais dire qui avait mis le feu, même à son analyste. Est-elle témoin ou complice ? Figure de la défiance ? De la honte ?

Le ciment fraternel fonctionnerait comme un corps « constitué » pouvant permettre une mise à distance du corps propre, en réaction à des motions pulsionnelles encore non symbolisées. Dans le cas de cette patiente, aucune altérité ne semble possible. Elle me demande de respecter ce voile : « (qui) permet au sujet, à celui qui fait appel à nous, de se mettre à distance de celui dont le réel désarroi pulsionnel fascine et inquiète, afin de recevoir une image qui donne enfin une consistance à ce que le sujet est pour l’autre.[3] »

Le feu ça brule, et on interdit aux enfants de s’en approcher. Bachelard écrit : « L’interdiction  sociale  est  notre  première connaissance générale sur le feu. » Je ne pense pas et vais tenter de le montrer.

Voici un texte d’un franc-maçon parlant du secret: « Le secret naît avec l’initiation; un secret qui, dans le même temps, unit et divise. Il unit l’apprenti à la loge dont il partage désormais les travaux. Mais avec ce secret si ardemment désiré par l’impétrant c’est aussi une coupure définitive avec la vie profane qui se joue. Le secret matérialise le passage du profane au sacré, de l’ombre à la lumière. Ce qui m’était jusqu’alors inconnu, m’est révélé progressivement par les différentes phases de l’initiation; pour que la lumière soit donnée, que ses frères se dévoilent à lui, l’impétrant sera débarrassé de son bandeau, ultime vestige de son aveuglement profane; mais cela ne peut se faire sans que le testament philosophique ne soit détruit ; il ne peut pas accéder à la lumière de l’initiation sans le renoncement absolu à cette vie qu’il quitte. Si l’initié accède à un secret, il en porte un autre profondément ancré en lui ; celui des aspirations qui l’ont conduit aux portes du temple. Ce secret il l’aura partagé avec ses futurs frères, et eux seuls, à qui le testament est lu avant d’être brûlé. »

« Le silence et le secret habitent le pouvoir, ancrent ses interdits ; mais ils desserrent aussi ses prises et ménagent des tolérances plus ou moins obscures. » écrit Foucault[4].

Qui a mis le feu ? A mettre en parallèle avec Qui est coupable ?

J’entends le feu comme la jouissance suprême, le plaisir lié aux masturbations, le déplacement de l’impossible mise en mots des interdits masturbatoires autoérotiques ou des premiers jeux de découverte avec le corps de l’autre. Le feu qui peut venir rougir les joues de certains analysants, m’évoquant la honte ou des résistances inconscientes. Les feux de l’amour du feuilleton éponyme. Comment, dans la toute petite enfance, des bruits dans la chambre parentale, un regard passé dans l’embrasure d’une porte entre-ouverte, le frôlement des parties génitales dans un moment inattendu de soin maternel ou de jeu, peut venir mettre le feu aux poudres ?

Le feu comme venant symboliser un passage du domaine du sacré ? « Chez les femmes, pas de rites visibles comme tels, pas de « cérémonie ». Les paroles accompagnant les règles des filles les faisant ainsi passer au statut de femmes sont un accompagnement d’un passage, d’une coupure définitive avec la vie « profane ». « Ce passage du profane au sacré, chaque fille le vit en devenant potentiellement mère au moment des premières règles. » écrit la psychanalyste Suzanne Delorme.

Quel contrat inconscient cette patiente a-t-elle passé avec ses frères et sœurs ? Quels sens possède-t-il ? Quelle jouissance partage-t-elle avec eux ? Ce contrat permet-il de souligner quelques échanges symboliques ou polysémiques garants d’un lien même imaginaire ?

Les recherches de Françoise Héritier Anthropologue, ethnologue, portent sur la distinction masculin/féminin, universelle, avec la découverte que la supériorité du masculin sur le féminin elle aussi universelle. Elle a écrit plusieurs ouvrages dont « Les deux sœurs et leur mère ». Elle écrit : « Cette forme de contrat entre hommes, l’expérience ethnologique nous la montre partout à l’œuvre. Sous toutes les latitudes, dans des groupes très différents les uns des autres, nous voyons des hommes qui échangent des femmes, et non l’inverse. Nous ne voyons jamais des femmes qui échangent des hommes, ni non plus des groupes mixtes, hommes et femmes, qui échangent entre eux des hommes et des femmes. Non, seuls, les hommes ont ce droit, et ils l’ont partout. C’est ce qui me fait dire que la valence différentielle des sexes existait déjà dès le paléolithique, dès les débuts de l’humanité.»

Le secret permettrait-il de préserver l’unité contre les représailles parentales et serait-il la base des sentiments de solidarité adossé à l’idéal du moi et au moi-idéal ? Pourrait-il préparer l’élan du communautarisme ? Ma patiente était reconnue comme garçon manqué par ses parents. Protéger la « bêtise » ou la tendance antisociale d’un frère, rester à vie son complice, serait-ce une tentative d’identification par peur de l’abandon ? Le collage par l’impossible différentiation ? Le maintien dans l’asservissement de la pensée et des corps ?

Cet attachement ne pouvait pas ne pas m’évoquer l’attachement de ma patiente pour sa grand-mère dont elle évoque en ce moment la perte comme un déchirement indescriptible, comme risque d’effondrement. Feu cette grand-mère habitait dans la cour de la ferme familiale et  s’était occupée d’elle pendant toute son enfance. Elle a un an de moins que sa sœur et 2 ans d’écart avec son frère puiné.

« Chez la plupart des enfants, le comportement d’attachement à une figure préférée se développe au cours de la première année de la vie. Il semble probable qu’il y ait une période sensible au cours de cette année où le comportement d’attachement se développe plus facilement. » écrit Bowlby[5]. Ma patiente évoqua l’effondrement vécu au moment de la séparation avec un ami de son frère ainé, ami avec lequel elle avait vécu 7 ans. Elle soufra non pas de la séparation mais de la violence de l’abandon fraternel et d’un sentiment de culpabilité qui la dévora. Sans plus de nouvelles de lui, son frère l’ignora, dit-elle, pendant 5 ans. Suite à une nouvelle rencontre, le moment de remaniement subjectif à la naissance de sa fille ainée permit les retrouvailles avec ce frère idéalisé.

 Les incendiaires : Déplacer sur la scène politique ses pulsions ? Les passages à l’acte comme prothèse identitaire ? Etre vu à défaut d’être entendu. Une voiture brûlée n’est qu’un signe en absence de tout signifiant, en attente de métaphorisation.

 

Quand chaque individu connait aujourd’hui cette phase d’érosion et d’épuisement de soi, le psychanalyste pourrait-il trouver le courage de convertir ce que lui a appris la cure analytique en prenant place, par sa singularité, à l’élaboration d’une pensée concernant la cité ? Comment penser, tenter de mettre au travail, ces coups répétés, assénés, autrement que comme de micro-traumatismes propres à affaiblir notre raisonnement ou nos capacités critiques ? Une biopolitique selon Foucault qui asservit les corps[6]. Sur le thème des émotions collectives, des événements politiques en tant qu’ils supposent des mouvements de foules en lutte : le psychanalyste ne saurait il trouver sa place au moment où sont mis en question désordres sociaux, agitations politiques, insoumissions, insurrections, révoltes, révolutions, vacarmes, émeutes, ou  bouleversements en tous genres ? Je pense par exemple à l’acte psychanalytique en lieu et place de castration symboligène, posé par Fathi Benslama lors des attentats en France proposant de ne pas nommer les terroristes dans les médias.

Pourquoi les banlieues s’embrasent-elles ? Quels motions inconscientes pourraient soit favoriser l’embrasement, soit au contraire favoriser le vivre ensemble et la fraternité ? Quels plaisirs prend-t-on à brûler ?

En réponse à l’incendie de trois bibliothèques à Paris en 1871 par une foule qui s’en prend à des représentations des élites, Victor Hugo, de Bruxelles où il est en exil, écrivit le poème « À qui la faute ?[7] » : il s’adresse à cet incendiaire anonyme et l’apostrophe « Tu viens d’incendier la Bibliothèque ? Oui, j’ai mis le feu là ». Et il continue en lui montrant que les livres seuls pouvaient le tirer hors de sa misère et, en lui faisant côtoyer des hommes du verbe, extirper de lui le mal ; peine perdue, la chute est terrible, l’homme répond « Je ne sais pas lire ».

 

« D’où proviennent de telles vésanies sinon d’une valorisation intempestive des phénomènes subjectifs attribués au feu ? » questionne Gaston Bachelard en 1949[8].

Fabre substantialise d’ailleurs par le feu toutes les qualités de force, de courage, d’ardeur, de virilité : « Les femmes à cause de ce tempérament froid et humide sont moins fortes que les hommes, plus timides et moins courageuses, à cause que la force, le courage et l’action viennent du feu et de l’air, qui sont les éléments actifs; et partant les appelle-t-on mâles; et les autres éléments l’eau et la terre, éléments passifs et femelles.[9]»

C’est la revanche du petit sur le grand, du caché sur le manifeste. En tout cas la pensée du feu, plus que celle de tout autre principe, suit la pente de cette rêverie vers une puissance concentrée[10].

L’idéal fraternel agirait comme forme d’inconscient social[11]. « La constitution de ces « foules artificielles » qui constituent le socle du bâti social et dont Freud fournit la formule libidinale : « Une somme d’individus qui ont mis un seul et même objet à la place de leur idéal du moi, et se sont par conséquence dans leur moi, identifiés les uns aux autres. [12]»  Cette identification réciproque par quoi ils font lien, ce qui rend compte de l’esprit de corps, ne faut-il pas y voir la socialisation basique du lien fraternel ?

Ce n’est pas rien que l’on évoque la communauté chrétienne comme une famille, écrit Freud (Ouvrage cité) Tous frères.

La crise de confiance et la défiance envers les élites qui s’en suit ne peut-elle s’intensifier par une analyse stigmatisante des faits, et provoquer l’embrasement ? La lecture psychanalytique ou l’écoute des signaux dans leur complexité s’échappant de la société permettraient-elles de participer à l’élaboration de nouvelles politiques ?

Un reste inaudible du domaine de l’inconscient n’aurait le passage à l’acte comme seul moyen d’ex-pression.

Ce moment exotique de visite dans une famille. De la fureur de vivre à la rage d’en découdre. La vengeance ? La première véritable manifestation de violence a lieu durant l’été 1981.

Le président Mitterrand lors des émeutes des quartiers en 1981 aux Minguettes à Vénissieux :

fresques.ina.fr/mitterrand/fiche-media/Mitter00106/visite-de-francois-mitterrand-a-saint-etienne-et-aux-minguettes.html

Il est certain que les questions de réhabilitation, d’aménagements d’espaces verts  n’ont pas permis « l’équilibre ce ces quartiers » tant espéré.

6 octobre 1990 : Vaux-en-Velin.

http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu01137/emeutes-a-vaulx-en-velin.html

Montée concomitante du FN et retour du discours colonial dans les politiques de la ville[13].

L’instrumentalisation-sublimation de la haine et les réseaux djihadistes. Un enjeu géopolitique ?

L’Iran joue avec le feu en critiquant les arrestations pour le Nouvel An

L’Iran a critiqué, lundi 4 janvier, l’arrestation par la police française de quelque 500 personnes durant la nuit de la Saint-Sylvestre, estimant qu’il s’agissait d’une « violation des droits de l’homme ». « Le comportement de la police française (…) constitue un exemple évident de violation des droits civiques, politiques, sociaux, économiques et culturels du peuple français », a déclaré le porte-parole du ministère des affaires étrangères, ajoutant que « le gouvernement français devrait essayer d’identifier les causes des récents troubles ». Ces dernières semaines, la France a multiplié les critiques contre la répression des manifestations de l’opposition en Iran[14].

La place des médias, et des médias russes en particulier[15].  La publicité faites aux casseurs. L’information légitime dans une démocratie. L’utilisation politicienne du nombre de véhicules brûlés permettant en cas d’élections la critique du camp adverse. La prise en compte de nouvelles données géopolitiques. Une voiture brûlée est-elle égale à une voiture brûlée ? Brûler le jour de l’An est-ce identique que brûler le 14 juillet ? Brûler des voitures, brûler des livres ou brûler des écoles ?

L’indétermination même dont le français entoure la «chose», par quoi elle devient litote égrillarde (s’intéresser à la «chose»), ignorance angoissée («il se passe des choses»), étonnement demi-muet (de «grandes choses»), etc., n’indique aucun caractère douteux, fantomatique ou indécis ; au contraire, l’indétermination résulte d’une irréductible altérité, présence devinée mais jamais forcée, d’autant plus obsédante qu’elle ne s’abandonne pas à l’évidence[16].

[1] S. Freud, E Bleuler, Lettres 1904-1937, Lettre de Bleuler à Freud du 7.11.1912, Gallimard, 2016 / Bleuler est en train de prendre connaissance du travail préparatoire à Totem et tabou (1912)  « Je sais aussi de moins en moins ce qu’est la culture. Et encore moins comment les limitations et sublimations de la libido devraient se comporter face à la culture ? » PP.154 Il évoque au cours de cette lettre une autre lettre perdue et écrit : « Par libido, Freud entend les désirs sexuels et ceux qui sont nés d’une métamorphose de l’énergie sexuelle et ont pris une autre direction. »

[2] J. Lacan, Le sinthome / Séminaire XXIII / 16 mars 1976

[3] O. Douville, « Avant le transfert, le contact. » in Le transfert adolescent ? , ERES, 2002, pp.140

[4] M. Foucault, « Histoire de la sexualité ; », La volonté de savoir, Tel Gallimard, 1976, pp.133

[5]  .J. Bowlby, Attachement et perte, Paris, coll. « Le fil rouge », puf, 1999, tome I, p. 302.

[6] C. Breuillot, « Psychanalyse de l’écoute. » https://psychanalysebourgogne.wordpress.com/2016/09/08/dune-biololitique-qui-asservit-les-corps-de-leffacement-psychanalyse-de-lecoute/  / Congrès Analyse Freudienne, Paris 2016

[7]  V. Hugo, Poème http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/victor_hugo/a_qui_la_faute.html

[8]  G. Bachelard, « Le feu sexualisé. » in LA PSYCHANALYSE DU FEU – Folio/Essais, 1992,  Première édition : 1949, Gallimard, pp.79

[9]  J-P. Fabre, L’Abrégé des secrets chimiques, Paris, 1636, p. 374-375

[10] G. Bachelard, Ibid pp.60

[11] P-L Assoun, Frères et Sœurs, Leçons de psychanalyse, 2ème édition, Anthropos, p87

[12] S. Freud, » Psychologie collective et analyse du moi. (1921)

[13] Le grand repli. (avec Nicolas Bancel, Pascal Blanchard et Ahmed Boubeker)

Institut du Monde Arabe, février 2016.https://www.youtube.com/watch?v=yogD3rsnlEQ

[14] http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/05/en-une-decennie-le-phenomene-des-voitures-brulees-s-est-etendu-et-banalise_1287638_3224.html

[15] http://www.france24.com/fr/20170213-video-peur-influence-medias-russes-presidentielle-2017-russia-today-sputnik-france-russie

[16] J. Allouch, « Note sur  « Raison et cause » en psychanalyse. » http://www.jeanallouch.com/pdf/179

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